Hitler, l'Europe et la Shoah
L'assassinat de masse industriel et rationalisé qui a été perpétré dans les camps de la mort était d'une forme inconnue jusqu'alors en Europe et dans l'histoire du monde. La Shoah est un événement paneuropéen qui n'aurait pu se produire si, à la fin des années trente, des millions d'Européens n'avaient pas souhaité mettre un terme à la présence millénaire des Juifs parmi eux. Récusant toute explication mono-causale, et évitant toujours l'illusion rétrospective de la fatalité (jamais la persécution n'est étudiée sans la résistance), Robert Wistrich passe au crible les interactions entre la politique de pureté raciale d'Hitler, la longue tradition européenne d'antisé-mitisme (tant chrétien que séculier), les troubles sociaux en Allemagne, les complicités des Églises. Il démontre comment se sont articulées plusieurs décisions à divers échelons pour aboutir à la Solution finale, et rappelle que l'Allemagne n'est pas la seule à s'être efforcée de répondre à la « volonté du Führer ». On mesure mieux l'autonomie relative de chaque pogrome, de chaque massacre en Europe, sans, naturellement, que Hitler soit en quoi que ce soit exonéré. Au terme de cette passionnante synthèse, R. Wistrich s'interroge sur la place de la Shoah dans la « modernité », insistant davantage sur le caractère européen du génocide que sur son caractère proprement allemand.