L'Abbé Jules
De son enfance retorse jusqu'au poste de secrétaire d'un vieil évêque qu'il mène à sa guise, en passant par le séminaire où il terrifie ses frustes condisciples échappés des travaux des champs, l'abbé Jules aura fait parler de lui. Jamais en bien.
Y a-t-il un coeur sous cette soutane ? On hésite... Provocateur, mystificateur, blasphémateur, l'abbé est aussi capable de contrition, mais d'une telle franchise, d'une telle violence qu'on la redoute autant que le reste. « T'z'imbéé ... ciles ! » éructe-t-il pour peu qu'on le contrarie, grotesque et fulminant, solitaire et pathétique.
Derrière la charge féroce - contre la Fille aînée de l'Église façon fin XIXe, contre une hypocrite bourgeoisie provincale - , si hénaurme qu'elle déclenche le rire autant qu'elle peut laisser de sombres impressions, une compassion vraie éclaire le roman d'Octave Mirbeau, compassion qui prend toute sa force de sembler involontaire. L'abbé Jules, grand corps gauche doté de trop d'énergie, érotomane et ascète, en est le grand bénéficiaire. Et son génial « T'z'imbéé .. . ciles ! » finit par rendre un son des plus fraternels.