La Mort de Mao
"Cher Julius,
Je n'écrirai pas un article sur La Mort de Mao. Cela me choquerait un peu. Je ne sais pas pourquoi. Sans doute parce que tu n'as pas écrit ces pages comme on fait "un livre". Au fond, ce que tu voulais, c'était dire en public : "Oui, j'ai pleuré, de simples et sauvages larmes, quand j'ai su que mon chien venait d'être écrasé. Et alors ?..."
Donc, Julius, pas un article, mais cette espèce de lettre "ouverte" - ouverte sur l'inaltérable paysage que déroule en nous l'amour de nos amis chiens, qu'aucune brouille, aucun honneur froissé, aucune sottise de vanité jamais ne défigureront. Ainsi, ceux que cette nouvelle intéresse, tous ceux qui luttent contre l'horreur, la laideur et la hâte qui nous assiègent en traitant avec honneur un compagnon lécheur et poilu, sauront qu'un homme fort, viril et guerrier, un écrivain, une sorte de notable un peu anarchiste et solitaire vient de leur apporter, en écrivant La Mort de Mao, la caution dont peut-être ils avaient besoin pour continuer d'aimer sans scrupule leur Mao à eux, leur Pilule, leur Médor, leur Jim, leur Polka, leur Crocblanc, leur Lassie... Ton récit leur fera ce qu'il m'a fait : chaud au coeur, et leur donnera peut-être comme à moi l'envie de mieux aimer les humains, à tout hasard, pour ne pas faire murmurer, et puisqu'il n'y a rien à perdre à tenter ce placement à fonds perdus quand on a mis à l'abri, dans une niche ou un panier, une partie de son capital de tendresse..."
Je n'écrirai pas un article sur La Mort de Mao. Cela me choquerait un peu. Je ne sais pas pourquoi. Sans doute parce que tu n'as pas écrit ces pages comme on fait "un livre". Au fond, ce que tu voulais, c'était dire en public : "Oui, j'ai pleuré, de simples et sauvages larmes, quand j'ai su que mon chien venait d'être écrasé. Et alors ?..."
Donc, Julius, pas un article, mais cette espèce de lettre "ouverte" - ouverte sur l'inaltérable paysage que déroule en nous l'amour de nos amis chiens, qu'aucune brouille, aucun honneur froissé, aucune sottise de vanité jamais ne défigureront. Ainsi, ceux que cette nouvelle intéresse, tous ceux qui luttent contre l'horreur, la laideur et la hâte qui nous assiègent en traitant avec honneur un compagnon lécheur et poilu, sauront qu'un homme fort, viril et guerrier, un écrivain, une sorte de notable un peu anarchiste et solitaire vient de leur apporter, en écrivant La Mort de Mao, la caution dont peut-être ils avaient besoin pour continuer d'aimer sans scrupule leur Mao à eux, leur Pilule, leur Médor, leur Jim, leur Polka, leur Crocblanc, leur Lassie... Ton récit leur fera ce qu'il m'a fait : chaud au coeur, et leur donnera peut-être comme à moi l'envie de mieux aimer les humains, à tout hasard, pour ne pas faire murmurer, et puisqu'il n'y a rien à perdre à tenter ce placement à fonds perdus quand on a mis à l'abri, dans une niche ou un panier, une partie de son capital de tendresse..."